Afin de restreindre l’approvisionnement de Huawei en équipements de pointe, l’administration Trump s’apprêterait à imposer de nouvelles réglementations aux fournisseurs américains de puces électroniques. Et pourrait favoriser ainsi l’essor d’une filière chinoise de semi-conducteurs au détriment des entreprises américaines, selon un rapport de BCG.
La presse américaine se fait l’écho depuis fin-mars d’un projet du département du Commerce visant à restreindre les achats de puces de fabricants américains par Huawei, le géant chinois de la 5G, qui en a un besoin impérieux pour réaliser ces équipements. Selon l’agence Reuters, qui a rapporté la première cette information, cette mesure serait en grande partie inspirée également par les réflexions stratégiques du Conseil national de sécurité et des départements d’État, de l’Énergie et de la Défense. Il justifie son objectif de menacer les chaînes d’approvisionnement de la firme de Shenzhen sur les risques que ses équipements représenteraient du point de vue de leur confidentialité et de leur fiabilité.
Vers le développement d’une filière chinoise de semi-conducteurs
Un rapport de BCG au début du mois de mars alertait pourtant les décideurs américains sur les risques que feraient courir une telle décision sur le secteur des semi-conducteurs aux États-Unis et plus généralement sur la production d’outils indispensables aux nouvelles technologies et ses conséquences en terme de croissance donc d’emploi.
Ce rapport estimait que l’empilement de mesures de limitation de la fourniture de semi-conducteurs américains aux grandes entreprises chinoises – au premier rang desquels Huawei – favoriserait à terme le renforcement de cette filière en Corée du Sud et en Chine. Au niveau national, Pékin a déjà lancé il y a plusieurs mois un fonds de soutien à cette industrie de 29 milliards de dollars pour accélérer son essor sur son sol. En attendant, et pour limiter les effets négatifs des décisions américaines, Huawei a elle décidé de développer ses liens avec la société franco-italienne STMicroelectronics. La firme de Shenzhen espère ainsi contourner les restrictions américaines en sécurisant son approvisionnement en composants de pointe pour le futur. Une perspective qui inquiète les fabricants américains, pour qui la Chine, à l’origine de 58 % de la demande en semi-conducteurs, représente un débouché commercial majeur.
Des répercussions sur le déploiement de la 5G à l’échelle mondiale
Une telle limitation à la fourniture de composants essentiels au déploiement des technologies 5G pour Huawei, leader de ce domaine dans le monde, est également porteur de risques concernant le développement des réseaux mobiles nouvelle génération. Un nouveau coup de frein qui pourrait représenter des conséquences économiques certaines pour les entreprises et gouvernements qui ont déjà investi des sommes et parfois du capital politique importants pour préparer son arrivée.
Les tensions entre Pékin et Washington sont particulièrement vives concernant la maîtrise de la 5G, et prennent un nouveau tour dans le contexte de la pandémie de Covid-19. Malgré les pressions exercées par Washington ses alliés, plusieurs pays européens, dont le Royaume-Uni, ont choisi de confier une partie du déploiement de leurs réseaux mobiles à Huawei. La France s’était quant à elle prononcée en faveur d’une participation limitée de la firme de Shenzhen à la mise sur pied de son réseau nouvelle génération.