Dans une ère technologique effrénée, l’Europe peine à tenir la cadence imposée par les tigres de l’innovation, les USA et la Chine. Les raisons de ce relatif retard sont complexes et nombreuses, et leur analyse rigoureuse reste un passage obligé pour réinventer la trajectoire technologique européenne.
Une ambition technologique étouffée
L’Union européenne (UE) a toujours considéré l’innovation comme un des piliers de son développement économique. Le fameux Agenda de Lisbonne lancé en 2000 en témoigne. Toutefois, cette ambition, loin d’être couronnée de succès, se heurte aujourd’hui à une réalité troublante. En effet, l’UE qui jadis aspirait à surpasser les USA dans le domaine technologique, s’est retrouvée devancée non seulement par ces derniers, mais aussi par la Chine. Ces deux géants de l’innovation ont su adapter leurs stratégies à l’époque numérique que nous traversons, profitant entre autres de l’avantage du « first mover ». En d’autres termes, ils ont su capitaliser sur leur avance technologique pour confirmer leur domination mondiale.
L’Europe : ancrée dans le passé
Cette situation est en partie due à la difficulté de l’Europe à s’extraire des modèles productifs du XXe siècle, comme en témoigne sa spécialisation dans des secteurs tels que l’automobile, la chimie, l’énergie, la pharmacie, la banque-finance et l’agriculture. Ces industries, bien que stratégiques, sont fortement bousculées par la création et l’implémentation de technologies révolutionnaires, par exemple l’électrification du transport routier ou encore les modèles spatiaux inspirés par SpaceX. Cependant, l’Europe peine à se manière avisée à ces innovations radicales.
L’aiguillon budgétaire
En outre, l’Europe reste néanmoins marquée par la sclérose de son budget dédié à la Recherche & Développement qui, à 352 milliards d’euros en 2022, est largement inférieur à ceux du Japon, des USA et de la Chine. Ce statu quo budgétaire impacte également la performance de l’Europe dans le dépôt de brevets, où elle marque un recul notable face à ses compétiteurs. Ainsi, parmi les cinq pays densement innovants au monde, figurent les USA, l’Allemagne, le Japon, la Chine et la Corée du Sud.
Pour une résurgence technologique européenne
Malgré ce tableau peu reluisant, l’Europe possède néanmoins des atouts indéniables pour s’affirmer sur la scène technologique mondiale. En tête de liste, un vivier de chercheurs impressionnant que seule la Chine rivalise. De plus, les entreprises européennes ont une présence remarquable dans tous les secteurs technologiques de pointe tels que l’IA, les biotechnologies, l’énergie renouvelable et le nucléaire. Cependant, ces entreprises européennes ne dominent que rarement ces secteurs, restant souvent dans l’ombre des géants américains et chinois.
Un réveil nécessaire
Dans ce contexte, il est impératif que l’Europe intensifie ses efforts, notamment en réformant sa politique d’investissement vers les secteurs immatériels. Ceux-ci, incluant la R&D, les logiciels et bases de données, le design ou encore la formation, constituent des leviers indispensables à la numérisation des entreprises et à l’innovation. Attention, il ne s’agit pas seulement de baisser le coût du capital immatériel par des subventions et des crédits d’impôts, mais aussi de créer un environnement propice à l’innovation, capable d’attirer et de retenir les meilleurs chercheurs et de faciliter l’absorption des nouvelles technologies.
La question demeure : l’Europe pourra-t-elle se réinventer pour sortir de cette impasse technologique et s’affirmer comme un acteur mondial incontournable de l’innovation ?